Eurosatory2022 : Heavy Metal Fury

Le rendez-vous mondial de l’armement terrestre, Eurosatory, qui se déroulait ce mois de juin à Paris, a permis de poser les yeux sur quelques-uns des plus impressionnants mastodontes de la planète : les MBT occidentaux. Tour d’horizon.

 

Sans maîtrise, la puissance n’est rien

Il a beaucoup été question ces derniers mois de la puissance blindée russe, et bien entendu, de ses limites. Une puissance qui tire surtout sa force du nombre (la fameuse masse), héritage du monde soviétique, et plus vraiment aujourd’hui de la qualité ou modernité de ces engins de guerre.

Si la Russie propose depuis bientôt une décennie le concept Armata, qu’elle a aujourd’hui le plus grand mal à faire entrer en phase de production, c’est bien pour s’aligner sur ce que propose le camp occidental, en l’occurrence l’OTAN, en matière de combat blindé. Et ce depuis les années 1980 et l’avènement du vénérable char Abrams américain.

 

 

 

MBT : « modern battle tank »

Les MBT occidentaux ont été conçus à la fin de la Guerre Froide comme la première ligne de défense sur le théâtre européen. Dotés de technologies derniers cris (en particulier l’armement, les moteurs, les conduites de tir, les capteurs…), ils n’ont de cesse d’avoir été modernisés depuis lors, et Eurosatory 2022 était l’occasion d’en découvrir certains sous leur meilleur jour.

On commence par le bestseller européen, le Leopard 2 dans sa version 2A7 désormais équipé d’un système de protection active d’origine israélienne Trophy.

 

A ses côtés, son voisin et concurrent : le char Leclerc français dans sa version « augmentée » XLR. La bête gagne des blindages additionnels, un tourelleau téléopéré, ou encore des brouilleurs.

S’il n’a malheureusement pas connu le même destin glorieux sur les marchés que le Léopard, le Leclerc reste bien l’un des meilleurs MBT au monde, 40 ans après sa conception. La France va en moderniser 200.

 

 

Mais penchons-nous sur le fils prodigue, l’enfant illégitime du Leclerc et du Leopard 2, l’EMBT : Enhanced Main Battle Tank. L’EMBT est en fait un hybride combinant le châssis du Leopard à la tourelle du Leclerc. Mais comparativement à la version présentée en 2018, bien des éléments ont été modifiés pour une optimisation renforcée. Surtout, assez d’espace a désormais été économisé pour pouvoir inclure à l’intérieur un membre d’équipage spécifiquement dédié aux systèmes (drones, capteurs, mitrailleuses téléopérée de 30 mm…).

Aussi séduisant soit-il, l’EMBT n’est aujourd’hui que la vitrine technologique du potentiel de coopération entre la France et l’Allemagne. Car le futur porte un autre nom, « MGCS » (Main Ground Combat System) et son char lourd du futur, qui lui ne verra le jour que dans les années 2030.

Une question subsiste : quel calibre ? 120 mm ? 130 ? … ou même 140 puisque le démonstrateur français ASCALON était également visible sur le salon.

 

 

Remarque : on notera l’absence sur le salon du char « Challenger » britannique, mais aussi et surtout des challengers coréen et turcs, avec respectivement le K2 « Black Panther » et le Altay.

 

 

Le retour de la Panthère ?

Enfin, nous avons gardé le plus impressionnant pour la fin. Le géant industriel allemand Rheinmetall a dévoilé à Paris le monstrueux KF-51 « Panther », un char annoncé comme ultramoderne et doté d’un canon de calibre 130 mm, théoriquement capable de tirer 50% plus loin que les traditionnels canons de 120, rien que ça.

Le Panther – qui reprend donc le patronyme d’un char légendaire de la Seconde Guerre Mondiale – pourra aussi déployer des munitions rodeuses. Tout comme l’EMBT, un 4eme membre d’équipage peut prendre place dans l’habitacle pour jouer le rôle d’opérateur de drones ou robots, assisté par des éléments d’intelligence artificielle.

 

Le hic, le projet de Rheinmetall vient directement concurrencer le programme franco-allemand !

 

Nous sommes à peine en 2022 mais déjà, les constructeurs laissent deviner à quoi ressemblera le char du futur, au design tout aussi impressionnant que sa puissance de feu ou ses systèmes embarqués. Avec la guerre en Ukraine, certains annoncent encore et toujours la fin du char lourd. Ce n’est pas la voie qui semble se dessiner !

 

https://www.youtube.com/watch?v=VW8T5xHNZ9g&t=1s

 

Eurosatory 2022 : des 4X4 au look radicalement futuriste

Ce mois de juin 2022 marquait enfin à Paris (après 2 ans de pandémie) le retour du plus grand salon de l’armement au monde : Eurosatory. L’occasion pour les équipes de Taisson d’y découvrir toutes les nouveautés en matière d’armement terrestre. Penchons-nous aujourd’hui sur les 4×4 dont le design nous a marqué.

 Ci-dessus: le concept “i-X” de John Cockerill. Photographies constructeurs & Taisson.

 

L’Ukraine l’a confirmé : small is beautifull

Le combat moderne nécessite l’alliance de la force, de la précision, et de la vélocité, un mantra que l’on retrouve dans bien des domaines de l’armement, de l’infanterie aux missiles de croisières hypersoniques.

C’est même un enseignement que l’actuel conflit ukrainien ne fait que renforcer, avec la preuve que des petites unités pratiquant la techno-guérilla peuvent provoquer des dégâts considérables à des unités blindés, même lourdes.

Sur le salon Eurosatory, édition 2022, nous pouvions donc voir les derniers prototypes de chars de bataille (ce sera l’occasion d’y revenir sur Taisson), ou encore les imposants véhicules MRAP désormais construits partout dans le monde… face à des blindés légers bien moins lourdauds, mais nettement plus punchy !

Nous ne nous attarderons pas même aujourd’hui sur les nombreux modèles de buggys ou fardiers (un concept étonnamment efficace) très en vogue chez les forces spéciales, pour nous concentrer sur une gamme blindée au-dessus.

C’est l’exemple de ces curieux véhicules israéliens, le Mantis et le Wilder, qui sur la même base, proposent respectivement chez Carmor et Plasan un 4X4 au look résolument inhabituel, offrant des performances de mobilités exceptionnelles, notamment en termes de franchissement.

Le Wilder peut-même contrôler à distance un armement lourd déporté sur remorque.

 

Fast and Furious

Mais passons la vitesse supérieure avec deux modèles européens qui faisaient partie des stars du salon.

Premièrement, le déjà bien connu Scarabée du constructeur français Arquus, qui avec son look ultra agressif a déjà remporté pas mal de suffrages en Europe et ailleurs. Il était cette année présenté avec un tourelleau téléopéré équipé d’une mitrailleuse, et d’un missile antichar.

Quelques dizaines de mètres plus loin, on pouvait trouver ce qui s’apparenterait le plus à un concurrent : le très étonnant John Cockerill « i-X », un 4×4 au look quasi-révolutionnaire dont la principale particularité est de cacher une tourelle de 25mm rétractable dans sa carrosserie (il peut théoriquement emporter de l’armement encore plus lourd).

Le véhicule est défini comme tout premier intercepteur terrestre, capable de rapidement intervenir sur une cible en mouvement, et de la neutraliser avant que cette dernière ne soit devenue une menace. Le concept, s’il reste à peaufiner, a fortement marqué les esprits !

Ces blindés légers pourraient constituer dans les toutes prochaines années de redoutables unités de reconnaissance et destruction.

 

Le monstrueux Mercedes Class G des forces spéciales

Terminons avec un véhicule destiné spécifiquement aux forces spéciales. Un véhicule découvert certes, mais au look tout à fait impressionnant : il s’agit du Class G de Mercedes, adapté au monde militaire par l’Allemand Rheinmetall.

Le « Classe G Caracal » partait d’une bonne base il faut dire, puisque sa variante commerciale offre déjà un design badass parfait pour un James Bond ou un Mission Impossible.

Malgré les apparences, l’engin, qui a été allégé, bénéficie d’une puissance de 249 chevaux qui permet au Classe G Caracal d’atteindre une vitesse de 140 km/h.

 

A ce jour, aucun de ces véhicules n’a encore trouvé preneur sur le marché mondial. Un état de fait qui devrait changer relativement rapidement tant on remarque qu’ils ont été conçus pour des besoins militaires de notre temps, et du futur.  Du côté du jeu vidéo, les créateurs à la recherche de concepts attrayants devraient eux commencer à se pencher sur ces différentes machines.

 

A quoi ressemblera l’hélicoptère du futur ?

Pendant la guerre du Vietnam, l’hélicoptère s’impose comme l’élément central des manœuvres aéroterrestres. Depuis, les technologies comme les impératifs opérationnels ont changé mais, assez paradoxalement, pas les appareils qui ont au final peu évolué. Cela devrait pourtant bientôt changer, puisque plusieurs programmes, portés par l’US ARMY, l’OTAN et des industriels, viennent esquisser ce que sera peut-être l’hélicoptère de demain.

 

Faire le deuil du Comanche…

Au milieu des années 80, les armées américaines mettent tous leurs espoirs dans la furtivité, qui sera selon elles le game changer du 21ème siècle.

De fait, alors que le mythique hélicoptère de combat Apache entre à peine en service en 1984 (il l’est toujours aujourd’hui, et sa version la plus moderne, le Longbow, est même devenue un grand succès commercial), l’US ARMY lance le programme Light Helicopter Experimental (LHX), qui doit aboutir à un engin de combat totalement furtif. Boeing et Sikorsky mettent au point, pendant 10 ans, un prototype qui est finalement présenté en 1996.

Le RAH 66 Comanche est effectivement un appareil avant-gardiste et doté d’une furtivité exceptionnelle (radar, thermique et sonore), mais la Guerre froide est terminée : les prévisions de commandes passent de 5.000 appareils à 600 et le programme, dont les coûts ont explosé, est définitivement abandonné en 2004.

Finalement, c’est dans le jeu vidéo que le Comanche aura eu une superbe carrière, de la série éponyme débutée il y a 20 ans jusqu’au plus récent Arma 3 qui, imaginant un conflit dans les années 2030, va en proposer une version modernisée…

 

… et de la furtivité.

Avec la mort du Comanche, c’est une certaine idée du futur des voilures tournantes qui disparaît : un hélicoptère n’est pas fait pour être furtif (tout comme un avion à décollage court ou vertical d’ailleurs, ce qui explique l’échec patent du F35B).

Un des meilleurs exemples de cette quête vaine est l’opération Neptune Spear en 2011, qui conduit à la  neutralisation d’Oussama Ben Laden. Au cours du raid, deux Black Hawk équipés d’un fuselage expérimental censé améliorer la furtivité radar, thermique et sonore (ils sont alors surnommés par la presse les Ghost Hawks) seront utilisés mais l’un d’entre eux se crashera, en raison de l’instabilité provoquée par le carénage, particulièrement au ras du sol.

  

Travaux américains sur le fuselage d’un Black Hawk.

Un “Ghost Hawk” reconstitué pour le film Zero Dark Thirty en 2012.

 

De fait, si l’hélicoptère furtif reste en vogue dans les jeux vidéo (comme dans Arma 3 où l’on trouve un Blackhawk furtif devenu le principal hélicoptère de manœuvre de l’US ARMY en 2030, et même une version furtive du CH-47 Chinook ), dans la réalité, il reste un fantasme de designer !

Ci-dessus les concepts furtifs créés par Bohemia Interactive pour Arma 3.

 

La vitesse avant tout ?

En réalité, la furtivité n’est pas vraiment un enjeu pour un hélicoptère qui se déplace à grande vitesse, et le plus souvent sous la couverture radar lors de vols tactiques…

Par contre la vitesse et l’endurance le sont et, malgré toutes ses limites, le concept des tiltrotor a ouvert le champ des possibles. Mais la technologie reste marginale et ne peut pas totalement supplanter les milliers d’hélicoptères en service (dont plusieurs milliers d’entre eux qui devront être remplacés, au sein des seules forces de l’OTAN, avant 2040).

De fait, c’est bien la rapidité et l’élongation qui sont au cœur de la réflexion actuelle : l’US ARMY et l’OTAN ont, d’ores et déjà, fixé comme exigence pour tous les futurs programmes une vitesse de croisière de 400 Km/h. Cela condamne, de fait, plusieurs modèles iconiques comme le Little Bird, que l’USSOCOM pourrait bien envoyer à la casse car il est incapable de suivre le rythme des appareils plus modernes.

Pour répondre à ce nouveau défi, aux Etats-Unis, le programme « future long-range assault aircraft » voit s’opposer le tiltrotor V-280 Valor et le SB-1 Defiant, un hélicoptère à rotors coaxiaux rigides et hélice propulsive et, en Europe, Airbus et son Racer sont aussi en concurrence avec d’autre projets hybrides.

Airbus doit faire voler le prototype de son hélicopter ultra-rapide Racer en 2022.

 

Quoiqu’il en soit, les capacités aujourd’hui espérées pour ces appareils futurs demanderont de véritables révolutions structurelles. L’hélicoptère de demain sera donc, en apparence, différent, voire très différent, de celui que nous connaissons aujourd’hui.

Les années qui viennent vont constituer un formidable laboratoire pour la conception de l’hélicoptère du futur. Plusieurs doctrines sont à ce stade en compétition, et le jeu vidéo pourrait bien s’en inspirer pour ses scénarios et gameplays, sans nécessairement inventer des engins farfelus et sans aucune logique opérationnelle.

Armer les avions de transport

Les avions de transport militaire ont quelque chose de mythique, en particulier dans la pop culture.  On en saute en parachute, on les utilise pour mener des opérations spéciales ou on utilise leurs immenses soutes pour des scènes d’actions toutes plus farfelues les unes que les autres. Mais pour l’heure, aucun scénario n’a osé intégrer une tendance lourde des avionneurs, qui consiste à transformer un transport en plateforme de tir pour missiles.

Ci-dessus: un KC-130J équipé du kit d’armes aéroportées Harvest Hercules (HAWK).

 

La révolution du Close Air Support

La Guerre Froide et l’avènement de la chasse à réaction ont mis fin au règne des grands bombardiers de la Seconde Guerre Mondiale. Mais leurs héritiers, les  cargos militaires, ont survécu et continué à se moderniser avec un grand nombre de success stories, que ce soit en Amérique (le Hercules et le Galaxy notamment), en URSS (les Antonov qui sont, rappelons-le, ukrainiens), ou en Europe (le Casa et l’A-400M pour ne citer que les plus récents).

Un C-130H argentin équipé de bombes en 1982.

 

La pop-culture s’est aussi emparée de la version « combat » de l’Hercules, et a élevé l’AC-130 Gunship au rang d’icône de la destruction, avec une « mort venue du ciel » (titre de la mission mythique de Call Of Duty Modern Warfare).

Pourtant, dans la réalité, le Close Air Support (appui-feu aérien rapproché) subit depuis une vingtaine d’années une petite révolution, sous l’effet combiné de deux tendances lourdes :

  • La première est que les avions de combat coutent de plus en plus cher tant à acheter qu’a entretenir et à faire voler. De fait, ils sont de moins en moins nombreux, et sont recentrés sur leurs missions principales, à savoir la chasse et la pénétration des défenses aériennes ennemies ;
  • La seconde est que les missiles sont de plus en plus précis et que, à condition d’être correctement orientés sur la cible (notamment avec un guidage laser par le sol ou par les airs), sont parfaitement autonomes à partir du moment où ils sont tirés.

Cela a donc logiquement conduit les forces aériennes et les avionneurs à imaginer transformer des avions moins onéreux, comme les turbopropulseurs ou les avions de transport, en plateforme de tir low cost mais tout aussi efficaces.

Les Iraniens ont également testé les bombes lisses depuis C-130. Sans grande réussite.

 

Le C130, un avion Old School de nouvelle génération

A tout seigneur tout honneur… l’Hercules C-130 a encore de beaux jours devant lui : outre sa version hydravion dont nous avons déjà parlé, plusieurs solutions pour lui faire tirer des missiles ont été présentées. La plus classique passe par des pods sous les ailes, mais on a aussi pu voir une porte arrière transformée en lance-missiles ou une porte latérale convertie en éjecteur à air comprimé pour de petits missiles de type Brimstone.

Projet français par Sagem, Rafaut and AA / ROK pour des bombes guidées AASM.

 

Le C-130 est aussi la machine privilégiée pour des projets d’armes laser, ainsi que pour le projet Gremlins, qui ambitionne de déployer des essaims de drones d’attaque réutilisables et, de fait, en mesure d’être récupérés en plein vol. Plus récemment, des tests de missiles de croisière « palettisés » ou de missiles antinavires ont également été menées.

Bien évidemment, c’est le C-130 Commando, la version dédiée aux opérations spéciales, qui a été choisie pour accueillir ces solutions, qui se superposent à des capacités de transport, d’aérolargage et d’atterrissage et de décollage sur des pistes sommaires, qui restent des prérequis pour l’USSCOCOM.

 

Smaller but stronger

Dans la même veine que le C-130, mais avec un ici un appareil moins imposant, Airbus a présenté deux versions armées de son petit transporteur tactique C295 :

  • Un « gunship », équipé de mitrailleuses de 12,7mm ou d’un canon de 27mm ;
  • Un bombardier doté de points d’emports pour des missiles (y compris antinavire) ou des paniers de roquettes guidées.

 

Descendons encore d’un cran, avec un cas très particulier, un appareil plus petit, et surtout plus rustique : le MC145B Coyote, version modifiée et armée du vénérable M28 Skytruck. Capable de se poser en environnement austère, ce robuste appareil peut emporter une petite équipe tout en déployant des bombes ou missiles guidés.

 

Cela rappellera un peu la militarisation des turbopropulseurs agricoles, ou même de certains hélicoptères civils. Une vraie tendance qui devrait largement convaincre dans certaines régions du monde.

Appliqué au jeu vidéo, ces appareils peuvent constituer un riche élément de gameplay, servant à la fois de base mobile, de système de soutien à améliorer progressivement durant une campagne.

L’effet « Jack in the box »

Tous ceux qui regardent, depuis quelques semaines, les images de chars de conception soviétique détruits se posent la même question : pourquoi perdent-ils leur tourelle de façon si spectaculaire lorsqu’ils sont touchés au combat ? La réponse est bien connue : il s’agit de l’effet « Jack in the box » (ou, pour les francophones, « le diable dans la boite »). 

https://www.youtube.com/watch?v=EBaxDMrQp-Q

Si le billet d’aujourd’hui est moins centré sur le jeu vidéo que d’habitude (quoi que, puisqu’il peut alimenter une réflexion sur les destructions de véhicules et les explosions), il nous permettra néanmoins de rendre hommage à la qualité de modélisation dans War Thunder , dont l’option “rayon X” qui va nous permettre d’illustrer nos propos grâce à des captures maison. 

 

Les tankistes russes, condamnés « by design » 

Dans la vision du combat blindé soviétique, le choc du feu et le nombre de chars prévalent sur la survivabilité depuis le T-34. Dans cette optique, les ingénieurs du Pacte de Varsovie ont donc travaillé sur des chars de conception simple, à la puissance de feu conséquente et au profil abaissé.  

Pour pouvoir armer plus de chars, les Soviétiques ont aussi misé sur un équipage composé de 3 soldats, et donc choisi de se passer du chargeur, remplacé par l’autoloader mécanique. Erreur fatale, car ce système de chargement, tel qu’il a été conçu en Russie, expose les munitions à l’impact des projectiles ennemis sur la tourelle, créant une réaction en chaîne qui pulvérise le blindé et son équipage.  

Le meilleur exemple de cette vulnérabilité est le T-72, le char qui a connu le plus de pertes dans le conflit ukrainien (y compris dans ses dernières versions modernisées). Les munitions du T-72 se trouvent dans un chargeur automatique de type carrousel directement sous la tourelle principale et les membres de l’équipage, et sont donc particulièrement exposées à tout impact venant des flancs. 

 

Sur des chars russes pourtant plus modernes, comme le T-80BVM, ou le T-90, la conception est identique:

 

Ainsi que pour les T-64, plus anciens et principalement utilisés par les Ukrainiens:

 

A terme, seul le nouveau char T-14 Armata devrait résoudre cette vulnérabilité, mais il semble n’être, pour l’heure, que l’une des multiples « armes miracle » russes, surmédiatisées mais non produites en série, et encore moins alignées au combat… 

 

En Occident, priorité à la protection de l’équipage 

A la vue de ces modélisations 3D, vous vous dites subitement qu’une carrière dans la cavalerie lourde n’est peut-être finalement pas une si bonne idée. Rassurez-vous, car la doctrine occidentale, qui a, elle, misé sur la survivabilité des chars et des équipages, offre un peu plus de garanties.  

En effet, sur la plupart des blindés occidentaux, les munitions sont conservées sous le plancher, là où le blindage est le plus épais, ou à l’arrière de la tourelle dans un compartiment spécifique. Ce compartiment de stockage n’est pas spécialement mieux protégé, mais il a l’ingénieuse particularité d’orienter l’explosion vers l’extérieur, et donc de préserver la vie de l’équipage et l’intégrité du char, qui reste fonctionnel.  

La plupart des chars modernes sont concernés, mais ce sont probablement les chars américains de la famille des M1 Abrams qui sont à ce jour les mieux dotés en la matière :  

 

Autres exemples ci-dessous avec le Léopard 2 allemand puis le Leclerc français. Les munitions sont à l’abri de compartiments spéciaux : 

 

A noter enfin que tous les chars occidentaux n’ont pas corrigé ce défaut. C’est le cas du Merkava israélien. Sa tourelle ultra-profilée ne permettant pas, ou plus, d’adaptation en matière de gestion des munitions, il mise lui plutôt sur des systèmes de protection “hard kill”. 

Les hélicoptères convertibles

Les hélicoptères convertibles, plus connus sous l’anglicisme “tiltrotor”, font entrer la famille des hélicoptères dans une nouvelle génération. S’ils sont aujourd’hui réservés au monde militaire, et plus encore au seul modèle opérationnel, le V-22 OSPREY, ils devraient rapidement se faire une place dans l’aéronautique mondiale, et aussi la pop culture, dans les années qui viennent.   

 

Des machines complexes et couteuses …  

Comme l’avion a décollage court ou vertical, l’hélicoptère convertible est un vieux rêve aéronautique. Les premiers essais remontent (comme souvent) à la Guerre Froide, mais le seul projet qui arrivera à maturité opérationnelle est, bien entendu, le V-22 OSPREY du fabricant américain Bell, mis en service à partir de 2005 dans l’US Air Force, l’US Marine Corps, ainsi que la Navy. Il est aussi le nouvel hélicoptère “Marine One” du Président Américain. 

Si seuls 400 Osprey sont en service actuellement (aux USA mais aussi au Japon), c’est surtout parce que c’est une machine technologiquement complexe, et donc très chère (autour de 100 millions USD l’unité, soit plus cher qu’un avion de chasse). Le programme a aussi connu de nombreux accidents tragiques tout au long de son développement et de son début de carrière opérationnelle, qui ont largement impactées les attentes opérationnelles placées en lui. 

 

… mais adaptées aux conflits modernes. 

Mais alors, qu’est ce qui fait de ces appareils un instrument idéal pour l’avenir ? Outre le fait que la pop culture en raffole, jeux vidéo et cinéma compris, le concept même de tiltrotor apporte avec lui des avantages déterminants pour le combat moderne. 

En effet, après le décollage et le basculement des rotors, l’appareil, “libéré” de sa configuration hélicoptère, peut atteindre une vitesse de croisière digne d’un avion tout en volant à une altitude qui le place en sécurité. Il permet donc de mener des missions héliportées “en profondeur”, parfait pour les forces spéciales, ou même les missions de search & rescue. 

Le double rotor en fait de surcroit un hélicoptère capable de transporter des hommes ou du fret, depuis un navire, ou sur un terrain dénué de piste. 

Ces arguments font des tiltrotors un choix pertinent, dans des conflits ou la vitesse et surtout l’allonge sont un avantage primordial. Ils intègrent par exemple parfaitement la doctrine des US Marines pour le combat aéro-amphibie (on en parle ici, ici, ou encore ici).  

 

Les hélicoptères entrent dans une nouvelle ère 

Le V-22 Osprey n’était que le point de départ, sorte de brouillon préfigurant du futur. En effet, avec son programme “Future Vertical Lift”, l’US Army s’apprête à choisir le successeur du célèbre hélicoptère Blackhawk. L’un des finalistes est le V-280 Valor de Bell, qui propose ici un concept plus abouti que celui du Osprey.   

Ce marché considérable pourrait définitivement ancrer les hélicoptères convertibles dans le paysage militaire. 

D’autant plus que d’autres pays pensent à leur concept, et que sont déjà imaginés des convertibles “super-lourds” dotés de quatre rotors ! 

Enfin, c’est bien entendu du côté des drones de combat qu’il faut se pencher, avec l’émergence de concepts de tiltrotors plus compacts et dotés d’armements lourds, capables d’agir depuis la mer et les porte-hélicoptères. Les navires américains devraient en effet recevoir dans quelques années des appareils comme le drone V-247, véritable hélicoptère de combat aux capacités boostées. Ils assureront notamment la protection des tiltrotors de transport.  

 Une maquette du V-247 “Vigilant” a été présentée par Bell, lourdement armée.

 

Les hélicoptères convertibles sont des appareils fascinants, et les voir voler est un véritable spectacle. Alliant la manœuvrabilité d’une voilure tournante aux performances d’un avion, leur avenir pourrait être radieux, avec des branches d’évolution impressionnantes. Cela devrait continuer à faire le bonheur du jeu vidéo comme du cinéma d’action. 

Kit de survie du char moderne

Les images qui nous parviennent du conflit ukrainien rappellent chaque jour à quel point la survie d’un char sur un champ de bataille de haute intensité est difficile. Alors, pour se protéger de missiles toujours plus performants, le salut se trouve-t-il, pour les tanks, dans les systèmes de protection active, et notamment les fameux « hard kill » ?

 Ci-dessus: le blindage additionnel rudimentaire de ce char russe en Ukraine n’a pas suffi. 

 

Les design innovants

Nous l’avons vu avec les MRAP, la qualité d’un blindage ne réside pas simplement dans l’épaisseur du métal qui le compose. Il existe en effet de multiples façons de protéger un véhicule blindé ou son équipage. Parmi elles, l’intégration, dès la conception, de solutions innovantes :

  • le placement du bloc moteur à l’avant du tank comme sur les Merkava israéliens, qui va arrêter le projectile en préservant l’équipage, même si le char est neutralisé;

Le char Merkava israélien est l’un des mieux protégés au monde.

 

L’utilisation de briques réfractaires dont le but est d’empêcher le projectile (principalement les obus-flèche, mais aussi les missiles de première génération) de percer le blindage. Apparues durant la Seconde Guerre Mondiale sur les Panzer (le fameux Zimmerit), elles deviennent communes à partir des années 80. Sur les nouvelles générations de blindés, les briques sont même, la plupart du temps, directement intégrées à la coque lors de sa fabrication.

Jupes protectrices sur un Panzer IV allemand durant la Seconde Guerre Mondiale.

 

Les solutions additionnelles

Pour les anciennes générations de blindés, ou face à de nouvelles menaces comme les missiles modernes ou les nouvelles charge AT tirées par les RPG, il est indispensables de s’équiper en solutions additionnelles :

  • les briques additionnelles, appelées “blindages réactifs explosifs”, sont destinées à neutraliser les projectiles à charges creuses. Apparues sur les blindés israéliens déployés au Liban dans les années 80, elles sont ensuite devenues une solution efficace de renforcer les anciennes générations de blindés confrontés aux missiles modernes ;

On distingue clairement les briques réactives sur ce T-72 russe modernisé.

 

  • les grilles de protection, dont le but est d’opposer un obstacle au projectile (principalement les RPG ou les missiles) et de le faire exploser avant son impact direct sur le blindage. Des schürzen (jupes) des panzers allemands, jusqu’à la rudimentaire « cope cage » vue en Ukraine, en passant par les « cages à oiseau » des Stryker en Irak, ce n’est pas la solution la plus esthétique, mais elle est efficace…

Un blindé Stryker de l’US Army en Irak.

 

Les systèmes « soft kill »

En plus des blindages principaux ou additionnels, les chars ont rapidement été équipés de solutions « soft kill », c’est-à-dire de systèmes ajoutés à la plateforme pour lui fournir des options de dissimulation ou de brouillage.

Dès la Seconde Guerre mondiale, on en retrouve le premier exemple avec l’ajout de lance-fumigènes sur les tourelles, mais avec l’arrivée des premiers missiles AT vont s’ajouter d’autres capacités comme les brouilleurs infrarouges fonctionnant littéralement comme des leurres, ou encore des lasers aveuglants.

Les brouilleurs infrarouges du T-90 lui donnent un look vraiment badass ! 

 

C’est aussi pour cela que les forces de l’OTAN s’appuient, à partir des années 70, sur des solutions aériennes pour « tuer » du char russe : en effet, aucun brouillage ne dévie les obus du canon Avenger d’un A-10 …

 

Le « hard kill » : solution miracle ?

On le voit aujourd’hui : les chars russes sont équipés de blindages additionnels ou de brouilleurs, mais cela se révèle bien inefficace face aux missiles de dernière génération, et notamment ceux, comme le Javelin, disposant d’un mode d’attaque « fire and forget » par le dessus, là où le char est le plus vulnérable. C’est pourquoi plusieurs pays ont développé ces dernières années, les systèmes dit « hard kill ».

Sur le papier, l’idée est simple : grâce à un radar à 360°, le char va pouvoir détecter un projectile en approche et déclencher automatiquement un jet de projectile (volée de plombs ou bâtons explosifs par exemple) dans sa direction, avec pour but de le faire dévier ou exploser avant impact.

La technologie est aujourd’hui mature, grâce à des capteurs et surtout des ordinateurs capables de traiter la menace en quelques millisecondes, et son efficacité est redoutable. Pour autant, un système « hard kill » reste complexe, lourd (plusieurs tonnes), et très onéreux, et ne protègent au final que des missiles et des roquettes.

Les systèmes les plus en pointe sont le Trophy et l’Iron Fist israéliens. C’est un succès commercial qui s’impose dans de nombreuses armées, au détriment notamment de plusieurs solutions américaines et de l’Afganit russe.

 

Finalement, la meilleure chance de survie d’un char n’est-elle pas à chercher dans une protection assurée soit par l’infanterie, soit par des blindés spécialisés comme le BMP Terminator ? La question reste ouverte. En tout état de cause, cette multiplicité de solutions mériterait d’être explorée dans le jeu vidéo, pour donner encore plus de piment à des combat épiques tels que certaines missions des Ghost Recon canoniques ou de Call of Duty…

 

La classe « Zumwalt » : l’échec d’une révolution

L’« USS Zumwalt » est le destroyer le plus perfectionné jamais construit. Mais si, avec ses lignes dignes d’un croiseur interstellaire tout droit sorti de Star Wars, il incarnait toutes les ambitions de la puissance maritime du futur, il se trouve aujourd’hui être l’échec le plus faramineux de l’histoire militaire contemporaine. Retour sur ce fiasco…

 

Le F35 des mers

La classe « Zumwalt » – du nom de l’Amiral éponyme – est une classe de destroyers, des navires fortement armés pour porter le combat de la mer vers la terre. Ce sont les véritables successeurs des grands cuirassés de la Navy, dont la carrière s’est terminée avec la Guerre du Golfe en 1991.

Pour comprendre le Zumwalt, il faut remonter aux origines du programme, dans les années 1990. Comme l’Air Force avec ses chasseurs F-22, F-35 ou son bombardier B2, l’US Navy veut des bâtiments alliant puissance de feu et, c’est nouveau, furtivité. Effectivement, grâce à leur étrave inversée et leur imposant château, ces monstres de 16.000 tonnes et 186 mètres adoptent un design révolutionnaire qui dope leur furtivité. Ils réussissent en effet l’exploit de pas apparaitre plus gros qu’un petit navire de pêche sur les radars ennemis.

Cela ne se fait pas au détriment de leur force de frappe, puisque pas moins de 80 silos à missiles sont disposés sur toutes les façades du bâtiment, et sont en théorie couplés à 2 pièces d’artillerie de 155 mm capables d’envoyer un projectile à 160 km : l’Advanced Gun System (AGS).

 

 9 milliards de dollars pièce.

Hélas, tout cela a un prix : leur coût unitaire est aujourd’hui estimé à 9 milliards de dollars, soit plus de 6 fois les estimations du début du programme. Bien plus couteux qu’un sous-marin nucléaire, ou même qu’un porte-avions !

En outre, les Zumwalt pâtissent de deux faiblesses majeures :

  • Ils sont privés d’artillerie : en effet, le prix unitaire d’un « Long Range Land Attack Projectile », la munition révolutionnaire tirée par l’AGS, est de 800.000 USD. Le couperet est finalement tombé, et on sait désormais depuis mars 2022 que les pièces vont être retirées;
  • Leurs systèmes automatisés ne sont pas matures : en théorie, les Zumwalt sont des systèmes très largement automatisés, et qui sont en plus des plateformes pour de nombreux sous-systèmes comme des drones aériens, de surface ou sous-marins. En réalité, l’équipage de 147 personnes (soit deux fois moins que sur un bâtiment comparable) est débordé, et le navire manque clairement de bras.

Dès lors, sur les 32 navires initialement prévus au début des années 2000, seuls trois navires sortent de cale entre 2016 et 2021 : l’USS Zumwalt (DDG-1000), l’USS Michael Monsoor (DDG-1001), et l’USS Lyndon B. Johnson (DDG 1002). En 2022, aucun n’est véritablement opérationnel, et les politiques ont définitivement dit stop à ce programme pharaonique.

Un avenir là où on ne l’attendait pas ?

Alors, que faire des destroyers Zumwalt, décidemment trop en avance sur leur temps ? Il fut imaginé à une époque que leur formidable capacité de production électrique pourrait servir à l’installation de canons électromagnétiques, les fameux railguns, mais cette option semble avoir fait long feu.

Finalement, on se dirige vers une autre solution plus rationnelle, mais néanmoins de rupture : ils pourraient, en effet, devenir d’ici 2025 les premiers porteurs de missiles hypersoniques dans les armées américaines.

Les trois bâtiments furtifs deviendraient alors de redoutables instruments de dissuasion destinés à maintenir la suprématie américaine dans le Pacifique.

 

Le Zumwalt est la star du roman “Ghost Fleet”:

 

Jeu vidéo et simulateurs militaires : une relation contrariée

Début mars 2022, le géant de l’armement BAE Systems a racheté pour 200 millions de dollars le studio spécialiste de la simulation militaire professionnelle Bohemia Interactive Simulations (BISim). Un mouvement qui nous montre que si le jeu vidéo s’est toujours nourri du fait militaire, l’inverse est aussi de plus en plus vrai.

Ci-dessus: une illustration du logiciel VBS4 de BISim.

 

La relation entre les armées et le jeu vidéo est très particulière (comme l’explique par exemple Alex). Elle diffère par exemple très largement du rapport des militaires au cinéma et se révèle être, au final, une histoire assez torturée de deux acteurs fascinés l’’un par l’autre, mais refusant souvent de se l’avouer.

 

Le jeu vidéo, un media puissant pour la communication des armées

Au début des années 2000, alors que le jeu vidéo devient un mass media, certaines armées s’y intéressent pourtant et espèrent toucher le grand public, principalement à des buts de recrutement.

On pense bien évidemment au célèbre et polémique America’s Army, un FPS free to play (et même l’un des premiers du genre) financé sur fonds propres par le Pentagone, et qui devient, dans un monde post 11-Septembre, véritable instrument de communication pour l’US Army.

De leur côté, les Russes ont plus récemment passé un partenariat avec World of Tanks pour des actions de marketing et aujourd’hui, dans plusieurs pays, les militaires lorgnent même du côté de l’e-sport ou du streaming pour approcher une génération totalement ancrée dans le monde numérique.

 

Simulations ou jeux ?

America’s Army n’est pas un exemple isolé. En 2004 sort Full Spectrum Warrior, un TPS tactique édité par THQ. Si le jeu propose de commander une Fire Team de l’infanterie américaine au milieu de villes qui ressemblent fortement à Bagdad, ce n’est pas un hasard : il est directement tiré d’un simulateur destiné à entrainer les chefs de section au combat urbain. L’éditeur a simplement pris la décision de simplifier sa formule afin de toucher le grand public.

Full Spectrum Warrior en 2004 – THQ

 

La stratégie est inverse chez Bohemia Interactive Studios (BIS). Après que sa simulation militaire Opération Flashpoint: Cold War Crisis ait révolutionné le genre en 2001 avec un scénario particulièrement travaillé et un réalisme extrêmement poussé (succès critique et commercial prolongé ensuite avec la série Arma), le studio, conscient du potentiel sur le marché professionnel, sépare alors ses activités et crée une branche destinée à la simulation professionnelle.

Aujourd’hui, BISim, avec son Virtual Battlespace Systems, fournit ses services à plus de 60 pays, dont la France.

 

L’industrie à la recherche de réalisme

Si le succès de BISim justifie aujourd’hui son rachat par un géant de l’armement, c’est bien que ces derniers ont compris qu’il « manquait quelque chose » à leurs produits professionnels.

En effet, comment convaincre les jeunes soldats de s’impliquer dans logiciels professionnels, alors que le rendu visuel et l’ergonomie de ces simulateurs est à des années-lumière de ce qu’ils ont l’habitude de voir au quotidien sur leur TV4K ou même leur téléphone ? En termes de visuel, de rendu et de sensations, aucun programme professionnel ne rivalise avec l’immersion d’un Call of Duty, et aucun simulateur aéronautique n’arrive à la cheville de DCS World ou du dernier Flight Simulator, développé à Bordeaux par le studio Asobo.

Cette nécessité de rattraper le retard du réalisme est donc cruciale pour les professionnels, car le marché mondial des environnements de formation et de simulation militaires pourrait dépasser les 11 milliards USD par an. D’ailleurs, si BAE Systems et BISim ont commencé à travailler ensemble en 2019, c’était pour répondre à l’appel d’offre de l’US Marine Corps War Gaming and Analysis Center.

La tendance est donc à ce que les éditeurs de simulateurs, mais aussi de solutions de maintenance en réalité augmentée ou de “Command & Control”, cherchent à coopérer largement avec l’industrie du jeu vidéo pour gagner en réalisme mais aussi, par exemple, en ergonomie.

 

Les ballons militaires, d’hier à aujourd’hui

De nos jours, on pourrait se dire que les ballons captifs ou les dirigeables sont des engins volants d’un autre temps, et qu’ils ne sont plus en mesure de concurrencer avions, hélicoptères ou drones. Pourtant, avec l’arrivée de nouvelles technologies, les « plus légers que l’air » ont fait, ces dernières années, un retour en force dans les domaines de la sécurité et de la défense.

 

Un usage intensif pendant le 19e siècle

Le premier usage militaire attesté d’un aérostat remonte à la bataille de Fleurus, en 1794, lorsque les armées révolutionnaires françaises font usage d’un ballon captif avec deux observateurs pour repérer les mouvements des troupes coalisées. C’est un succès, et c’est d’ailleurs un emploi qui est repris avec beaucoup de fidélité dans la très bonne série de STR Cossaks.

On peut utiliser des ballons pour découvrir le terrain dans la série Cossaks. Une vérité historique.

Par la suite, les montgolfières vont servir pour l’observation et le guidage d’artillerie dans plusieurs conflits du 19ème siècle, et notamment pendant la guerre de Sécession, qui en fait un usage intensif. De manière anecdotique, elles serviront aussi à établir une sorte de pont aérien pour une partie du gouvernement français en 1871, lorsqu’il s’agira d’évacuer Paris face à l’encerclement des Prussiens !

Pendant la Première Guerre Mondiale, les ballons servent encore aux réglages pour l’artillerie au début du conflit, mais le passage à la guerre de tranchées et le développement de l’aviation les rendent vulnérables et obsolètes. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, les Alliés les utiliseront uniquement comme barrages aux raids aériens de l’Axe, comme sur les plages du débarquement.

 

La brève ère des Zeppelin

Depuis la fin du 19e siècle, en Allemagne, le comte Ferdinand von Zeppelin travaille sur un projet de ballon rigide et dirigeable par l’ajout de moteurs et de gouvernails. Depuis ses usines situées sur le lac de Constance, sa société produit, au fil des années, des monstres d’ingénierie et d’acier qui vont durablement marquer l’imaginaire collectif, notamment avec la fameuse séquence d’Indiana Jones et la dernière croisade.

Pour autant, ces engins n’ont eu, au final et un peu à la manière des hydravions de la même époque, qu’une période d’utilisation très brève. Si celle-ci prend tragiquement fin avec la tragédie du Hindenburg en 1937, ce drame a pourtant été précédé de nombreux autres, car les dirigeables sont difficiles à manœuvrer, instables et surtout extrêmement inflammables …

Les Zeppelin ont aussi eu un usage militaire : durant la Première Guerre Mondiale, ils volent de nuit pour éviter la chasse et les canons anti-aériens, et mènent des raids contre les grandes villes ennemies, y compris Paris et Londres. Si les bombardements particulièrement rustiques (les opérateurs percutent des obus avant de les lâcher à la main depuis la nacelle) ont un impact stratégique extrêmement limité, l’effet psychologique sur les populations est, lui, démultiplié.

Ils ont inspiré une séquence particulièrement réussie de Battlefield 1, mais aussi, pour les plus anciens, le remarqué Crimson Skies en 2000!

 

Les ballons modernes

Pour autant, les ballons n’ont pas disparu du ciel des théâtres de guerre. Après quelques expérimentations hasardeuses dans la récupération de personnels en milieu hostile durant la Guerre Froide (comme le système de récupération surface-air Fulton, vu dans Metal Gear Solid ou dans The Dark Knight), ils font aujourd’hui un retour remarqué.

Des ballons captifs ont ainsi été déployés à des fins de surveillance et d’alerte avancée au-dessus de Kaboul mais, aussi, plus récemment, pour protéger des bases avancées (FOB) au Sahel ou au Levant. Des pays comme la Chine, Israël ou le Brésil (notamment pour la sécurisation des JO de Rio et de la Coupe du Monde) en font un usage intensif, et ils pourraient bien devenir une solution efficace contre les drones ou les munitions rodeuses.

En effet, en plus d’être bardés de capteurs et semi-automatisés, les ballons actuels sont très résistants aux conditions météo défavorables (par l’utilisation de calculateurs et de stabilisateurs automatiques), et capables d’encaisser de nombreux projectiles grâce à leurs revêtements bulletproof ou autoréparants. De plus, ils sont remplis de gaz inertes (plus de risque d’incendie) qui assurent une portabilité même en cas de pertes sévères.

Le ballon captif de la société CNIM Air Space.

Les dirigeables militaires sont eux aussi de retour : pour des projets de transport de charges lourdes au-dessus de territoires peu ou pas accessibles par la route et pour éviter d’avoir recours aux couteux transports aériens lourds, mais surtout dans le cadre de projets de pseudo-satellites.

En effet, quelques pays, dont principalement la France, étudient l’emploi de ballons stratosphériques dirigeables autonomes de la famille des HAPS (High Altitude Platform System). Positionnés à 20 km d’altitude, ils pourraient offrir une couverture régionale en communication, imagerie ou radar digne d’un satellite. Les premiers vols sont prévus en 2023.

https://www.youtube.com/watch?v=nvmkendJI2Y

 

Ballons captifs ou dirigeables font résolument partie de la Pop-culture et sont très présents dans notre imaginaire.  Pour autant, ils sont souvent employés dans des scenarii uchroniques ou peu réalistes, alors que leurs versions modernes ouvrent de larges perspectives en terme d’écriture ou de gameplay.