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Tom Clancy et les jeux vidéo

Le trailer de Rainbow Six : Extraction, où l’on affrontera des monstres extraterrestres, est l’occasion de rappeler au plus jeunes d’entre nous (mais aussi, peut-être, aux autres), qui était Tom CLANCY, dont le nom est accolé à ce shooter compétitif désormais bien loin de l’esprit de la licence. 

L’inventeur du techno-thriller

 

Né à Baltimore, Tom CLANCY est très tôt passionné par les questions militaires, mais sa mauvaise vue l’empêche de rentrer dans l’armée. Il devient donc agent d’assurance, mais se met à écrire, sur son temps livre, un roman inspiré de l’histoire d’une frégate russe qui, en 1975, tente, sans succès, de faire défection (le capitaine sera jugé pour trahison et exécuté 9 mois plus tard). 

Sous sa plume, le navire devient un sous-marin indétectable, et A la poursuite d’Octobre Rouge (1984) un best-seller qui s’écoule à plus de deux millions d’exemplaires, car il invente un nouveau style : le techno-thriller. Dans les romans de CLANCY, le héros s’appelle Jack RYAN, et on suit ses aventures au fil de 17 romans. Il évolue dans un monde militaire et technologique incroyablement documenté, et se retrouve au cœur d’intrigues géopolitiquement plausibles au point que certaines anticipent même la réalité. 

 

Un républicain et un patriote américain

 

Octobre Rouge parait sous la présidence de Ronald REAGAN, le président des Etats-Unis qui a décidé de faire tomber l’Union Soviétique et le Pacte de Varsovie. Les romans de CLANCY, résolument pro-américains et où les Russes sont systématiquement les méchants, sont donc très appréciés du locataire de la Maison Blanche, qui dira de l’auteur qu’il est le « plus grand patriote de notre temps ».

Toute sa vie, Tom CLANCY restera un pur Républicain, et un patriote américain. Ses romans se déroulent à travers le monde, mais ont pour héros principaux les forces armées et les services de renseignement américains. Il n’aura jamais cédé à la moindre ouverture à l’international, à part peut-être pour les Rainbow Six, une unité antiterroriste de l’OTAN, mais néanmoins pilotée par les USA…

 

Un style particulièrement adapté au cross-media 

 

Les romans de Tom CLANCY sont rapidement adaptés au cinéma : plusieurs films sont des blockbusters, portés par des acteurs de premier plan (Harrison FORD, Sean CONNERY, Alec BALDWIN, Kevin COSTNER…).

C’est donc assez naturellement qu’en 1996, Tom CLANCY crée, en Caroline du Nord, le studio de jeux vidéo RED STORM (du nom de son second roman, Red Storm Rising), qui va explorer de manière différente son univers. Revendu à UBISOFT en 2000, il est à l’origine de trois franchises majeures, qui ont durablement marqué l’histoire du jeu vidéo :

 

  • Rainbow Six (1998)

 

unité antiterroriste de l’OTAN, elle est composée de membres de groupes d’intervention de divers pays. 

A sa sortie, le jeu est connu pour être extrêmement réaliste (notamment au niveau de la précision du tir, de la planification tactique et de l’importance de l’équipement dans la maniabilité du personnage), et surtout porté par un scénario parfaitement plausible basé sur une arme bactériologique utilisée contre la finance mondiale réunie à Davos (la comparaison avec The Division s’arrête là, tant le jeu est réaliste et difficile, loin d’une absence totale de réalisme tactique et d’authenticité sur le looter-shooter de 2016).

Longtemps considérée comme le « simulateur de SWAT » ultime, la franchise R6 glisse vers l’action shooter de très bonne facture avec les R6 : VEGAS. Si elle y perd une partie de son réalisme, elle reste portée par un scénario extrêmement solide (notamment par les remous d’une crise mexicaine décrite dans GHOST RECON : ADVANCED WARFIGHTER et une mission de HAWX). 

Un tournant majeur est entrepris avec R6 : SIEGE, un multijoueur qui casse tous les codes du jeu CLANCY (authenticité, réalisme, scénario plausible) pour offrir à Ubisoft son alternative aux jeux PvP compétitifs à succès que sont CSGO, Overwatch ou Fortnite. 

Cette toujours cette voie qui est suivie aujourd’hui avec EXTRACTION… voie qui éloigne la licence de son esprit originel, et surtout de celui de son auteur. 

 

  • Ghost Recon (2001)

 

Unité secrète des forces spéciales américaines, sous le contrôle direct du président américain et du JSOC, les GHOSTS sont déployés sur des théâtres d’opération où les USA ne veulent pas apparaitre directement. 

Le scenario du premier GR est si réaliste qu’il anticipe de manière extrêmement précise la guerre qui opposera la Géorgie et la Russie en 2008, et les épisodes suivants s’attacheront toujours à offrir un environnement géopolitique extrêmement plausible… Du moins jusqu’aux épisodes WILDLANDS et surtout BREAKPOINT (auxquels j’ai modestement participé), qui perdent eux aussi l’essence de l’héritage CLANCY.

 

  • Splinter Cell (2002)

Si la série est, d’emblée, moins « mature » et ancrée dans la réalité que les précédentes, elle permet néanmoins l’émergence de l’un des héros les plus badass du jeu vidéo, Sam FISCHER, et donne naissance au jeu d’infiltration moderne. Au moment de sa sortie, SPLINTER CELL est considérée comme le seul vrai concurrent occidental à METAL GEAR SOLID du Japonais Konami. 

Hélas, la série glisse aussi peu à peu vers l’action pure (notamment avec BLACKLIST et CONVICTION) et déforme, elle aussi, la volonté de son créateur et surtout l’amour des fans du style. Les récentes annonces concernant Sam ne rassurent hélas pas sur le retour d’ECHELON…

 

A l’heure du bilan, on se demande bien pourquoi UBISOFT s’obstine à produire des parodies de jeux TOM CLANCY, où chaque nouvelle sortie éloigne un peu plus la licence de son esprit originel. Un crève-cœur pour les « anciens », qui rêvent toujours des épisodes canoniques… Combien de fois ais-je rencontré des gamers nostalgiques de l’ère Red Storm, évoquant R6 : ROGUE SPEAR (qui a oublié la formidable bande originale de Bill BROWN ?), SPLINTER CELL 2… ou même les épisodes VEGAS sur console.

Le plus grave est peut-être que l’esprit CLANCY survit et s’épanouit loin du nom de son auteur : d’excellents jeux d’infiltration ont repris les recettes de Sam FISCHER, et les modes solo de CoD et de BATTLEFIELD (pour ne citer qu’eux) ont longtemps tenté de s’approcher du techno-thriller et des scénarios à rebondissements que proposaient les premiers jeux de RED STORM. 

La présentation de R6 Extraction reçoit globalement un mauvais accueil, suscitant l’incompréhension chez une majorité de joueurs qui se demande quelle direction emprunte désormais la licence. Une opportunité se présente pour UBISOFT, qui devrait donc soit débrancher le patient TOM CLANCY et le laisser mourir comme son auteur, soit le remettre sur pieds pour lui redonner ses lettres de noblesse et son identité unique…

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